Cinéma 26 aoû 2014

Décès de Jean Cosmos

Jean Cosmos, auteur à la carrière multiforme, s’est éteint. Hommages.

Laurent Heynemann

Notre dernier projet s'appelait Deux amis de longue date, c'est un scénario écrit pour le plaisir, un film d'époque, une joute entre Voltaire et Frédéric, de la finesse, de la subtilité… Quel titre heureusement prémonitoire pour me lancer dans l'accomplissement du redoutable honneur d'évoquer la mémoire de Jean Cosmos.

J'ai connu Jean sur les chaises moelleuses du Conseil d'administration de la SACD. Nous avons prolongé par quelques projets sans suite, mais en entente complice; puis nous sommes entrés dans le concret grâce à Gérard Jourd'hui : Maupassant… Trois films…! Courteline puis Octave Mirbeau. Cinq films ensemble… !!!

Je fais exprès de scander ce petit texte de points d'exclamation, de points-virgules placés astucieusement (entre parenthèses de sourires et d'attendrissements sous-jacents) car Jean était un maître de la ponctuation. Il la manipulait si bien qu'elle était indication de jeu pour les acteurs. Il avait l'orthographe maline et l'autographe espiègle.  Son écriture était une calligraphie perspicace. Il maitrisait les pleins et les déliés et balançait des points d'interrogation derrière des points d'exclamation lorsque les personnages s'étonnaient malicieusement. Il instillait du suspens avec de la suspension là où l'on attendait des virgules. Je ne laissais à aucune secrétaire le soin de dactylographier les pages qu’il m’envoyait.

Depuis 2005 et pendant cinq ans, jusqu'à ce que la haute instance du Service public de télévision, qui, dans un réflexe bien français de toujours vouloir faire le contraire de ce qu'a réussi son prédécesseur, a mis fin à la collection, Jean Cosmos m'a accompagné dans la conception, a assumé l'écriture, a partagé les idées de casting d'une aventure exceptionnelle.

Pendant ces cinq ans, nous avons vécu tout ce que des créateurs peuvent vivre de plus gratifiant: l'entente avec un producteur intelligent créatif et ambitieux, le succès de l'audience, les bonnes critiques, les sollicitations de toutes parts et surtout du milieu scolaire, pour venir présenter, ou accompagner les diffusions des films.

La collection Maupassant a été, tant sur le plan de l'égo que sur le plan de ce que je pense être le rôle social des auteurs de télévision dans ce pays, une réussite absolue.

L'arrêt de cette collection, que je considérais avec colère comme un attentat contre l'intelligence, a été pour Jean une simple nouvelle comme attendue, ordinaire, banale, tant il avait vécu de changements de directions, tant il avait croisé de petits chefs éphémères, et tant il avait salué respectueusement et malicieusement les certitudes arrogantes dispersées par des mandats volatils.

Sachant que d'autres vont évoquer la multiformité de sa carrière : auteur de radio, auteur de chansons, auteur de théâtre, scénariste de cinéma, de séries télévisées etc., j'en arrive à une anecdote qui, à mon souvenir, évoque son rapport à l'amitié, sa rectitude professionnelle, son amour du travail, sa passion du texte.

Tous les ans donc, novembre était le mois où Gérard Jourd'hui, Cosmos et moi décidions du texte à adapter. Décembre était le mois de la conception commune, de la construction dramatique que nous accomplissions tous les deux, et janvier, le mois de l'écriture des dialogues qu'il effectuait seul. Dix février, je recevais le texte, le lisais, faisais mes remarques, quelques corrections… Puis je me mettais au travail de dactylo… Quinze février était la date traditionnelle de remise du texte.

Mais cette année-là, fin décembre, tombe une mauvaise nouvelle : Jean est très souffrant. Il a même été transporté à l'hôpital et nous sommes tous très inquiets. Début janvier il m'appelle pour me rassurer sur son état de santé mais m'annonce qu'il n'a pas la force de travailler. Je le rassure, je vais m'arranger avec la production pour retarder les échéances. Sitôt dit sitôt fait, Gérard Jourd'hui m'apaise ; on décalera en intervertissant les tournages des autres films de la collection. J'en informe donc Jean que je crois rassurer. Mi-janvier, Jean m'appelle pour me dire qu'il pense se remettre au travail début février et respecter ainsi les dates de son contrat en travaillant plus intensément (ce que personne ne lui demande). Je lui rappelle que si le texte arrive fin mars, c'est amplement suffisant. Mais je sens bien qu'il n'aime pas ça… Le 10 février il m'appelle: " Salut ! C'est Cosmos ! Alors dis-moi !? Bon…! J'ai fini… Je t'envoie ça ce matin ! "

Georges Werler 

Cher Jean,

Ton départ est une vraie blessure qui  nous laisse douloureux et perdus. Tant de choses ressurgissent du passé, et tant de souvenirs joyeux. Avec toi il était impossible d’être triste. Sans toi…

Je veux te dire merci pour tout.

Tu as été présent à tous les carrefours importants de ma vie : comédien sur toutes tes adaptations faites pour le TEP, devenu « Théâtre de la Colline », assistant sur ta pièce Monsieur Alexandre, metteur en scène sur ton adaptation du Marchand de Venise, acteur à la télé et même dans une de tes réalisations.

Oui, merci ami.

Tu intervenais toujours avec tact  et modestie. Intelligent, précis dans tes remarques toujours pleines d’humour. Tu étais la gentillesse et la fidélité. Ca faisait du bien de te voir et de te voir avec Lillette.

Il y a quelques temps tu m’as téléphoné pour me dire qu’il y avait une vingtaine d’années tu m’avais promis une revue sur le théâtre et qu’il était temps que je vienne la chercher ! J’y suis allé ! Nous avons déjeuné, et beaucoup ri en évoquant ces folles années du TEP pour lequel tu as tant fait et tant donné.

Tu as été le premier à me parler de la SACD et du droit d’auteur.

Tu pouvais t’amuser comme un gamin. Avec qui maintenant vais-je pouvoir évoquer ce qui apparemment n’a plus d’intérêt mais qui nous était si cher ?

Je t’embrasse.

Bertrand Tavernier 

Travailler avec Jean Cosmos : 25 ans de bonheur

Jean, j’avais commencé à t’écrire une lettre pour reprendre ces échanges épistolaires où l’on se disait tout et n’importe quoi. Où je te conseillais des livres et des films, où tu me parlais, dans les dernières surtout, de la joie  que tu avais ressentie, de la fierté que tu avais éprouvée en revoyant La Vie et rien d'autre, Conan ou La Princesse de Montpensier. Tu m’attribuais à ton habitude tous les mérites.

Mais la mort, scénariste envieuse et méchante, a décidé de stopper notre correspondance. Et je reste là, orphelin de tant de bonheur, de tant de joie, orphelin d’une de ces amitiés si fortes, si rares. Après un autre Jean, Aurenche, c’est toi qui t’en va. Celui qui croyait au Ciel et celui qui n’y croyait pas. Après David Rayfiel, mon copain, mon frère.

Je reste là et, au-delà de ma peine, je pense à tes enfants, à Marie Laurence et j’ai envie de dire comme Noiret dans Que la fête commence, Dieu est méchant. Mais tu me regarderais et tu me dirais : « Ce n’est pas la peine d’aller accuser Dieu, il y a l’âge, la vie qui s’use et qui vous diminue et vous ronge. Mais il nous reste nos souvenirs. Et tous les films qu’on a faits ensemble. »  Oui les souvenirs, à commencer par la merveilleuse Lilette qui, en disparaissant la première, te laissa une immense plaie au cœur. J’aime à penser que vous vous êtes retrouvés et aussi que tu vas pouvoir discuter, au paradis des scénaristes, avec Spaak à qui nous avions rendu un sacré hommage dans Laissez-passer, Prévert qui répéterait à ton propos ce qu’il m’avait dit pour Aurenche et Bost : « Leur présence me garantit la rectitude morale du film. »

Tu te souviens Jean, tout a commencé pour nous deux à la SACD. C’était là que j’avais déjà rencontré Louis Ducreux qui allait devenir le héros de Un Dimanche à la campagne. J’avais remarqué tes interventions, tes prises de position. J’ai voulu mieux connaître ce que tu écrivais et tu m’as prêté quelques cassettes avec Julien Fontane, La Dictée (quelle émotion) de Jean-Pierre Marchand, réalisateur que tu estimais beaucoup, La Filière, Fabien de la Drôme sans oublier Les 5 dernières minutes. Et j’ai immédiatement voulu te proposer un sujet de film. J’avais été impressionné par ton écriture scénaristique, la manière dont tu rentrais en symbiose avec une époque, un milieu. Par l’attention accordée aux métiers des personnages et à tout ce qui en découlait. Exactitude du vocabulaire qui entrainait  l’exactitude des gestes. J’ai très vite compris, dès La Vie et rien d'autre, d’où cela venait. De ton expérience quand tu as du t’occuper de la reconstruction de Boulogne et que tu as du affronter des métreurs, des plombiers, des couvreurs, des maçons. Tu étais très à l’aise avec ces personnages populaires que tu regardais à hauteur d’homme et avais pris à leur contact, un goût de la précision, de la vérité. Dieu que tu m’as fait rire quand tu m’évoquais les affres d’un jeune homme qu’on avait bombardé architecte, faute d’effectifs, alors que sa seule connaissance se limitait aux habitations étrusques. En tout cas, chez toi, les cafetiers, les artisans, les greffiers, les zingueurs étaient décrits, avec une rare justesse et tes dialogues sonnaient incroyablement juste. Pensez à Ardéchois cœur fidèle et à ses compagnons, sujet formidable que je voulais refaire au cinéma car tu détestais la mise en scène. Je m’en veux de ne pas avoir assez insisté... Et à tous ces métiers que tu abordais à travers chaque épisode des 5 dernières minutes. Tu m'avais fait beaucoup rire en m'évoquant les aléas que causait le tournage en direct surtout quand Loursais avait soudainement décidé de changer l'assassin.

De même, tu avais vécu certains des événements qu’on voyait dans Laissez-passer, tu avais été témoin oculaire du bombardement de Boulogne. Mais on a coupé un bout de ce que tu avais vécu, ce professeur qui récitait du Baudelaire sous les bombes. C’était trop beau, cela faisait cinoche. On a gardé ce qui était pour toi les obsessions de l’époque : le froid et la nourriture (avec ce « beurre liquide » qu’un machino veut revendre et ces poissons ramassés dans la Seine après le bombardement : « La tanche, c’est du buvard, ça prend le goût dedans quoi ça cuit. »).

Et un jour j’ai apporté le projet de La Vie, quelques pages sur une femme recherchant en 1920 son mari qui était l’un des 350 000 disparus et je t’ai dit que je voudrais inclure  la manière dont on avait trouvé le Soldat inconnu. Je ne savais pas comment il avait abouti sous l’Arc de triomphe. Tu m’as tout de suite répondu : « Ça je sais ; on en a parlé pendant 4 ans et il a fallu le trouver en une semaine. » Tout ce qu’explique Michel Duchaussoy dans le film. Puis quelques jours après, tu m’as proposé une liste de personnages par ordre d’importance et là, il y avait en 6ème position, rôle assez secondaire dans ton idée, un officier obsédé par le nombre des disparus et des morts. Et je t’ai dit : « C’est lui le héros. » Et il est devenu le Commandant Dellaplane. Un frère, un ami. Et le rôle favori de Philippe Noiret.

Ce fut le début d’une merveilleuse aventure, d’une complicité (collaboration est un mot qui m’ennuie) de tous les instants. En arrivant chez toi, porte de Brancion et plus tard dans des auberges ou à Ville d’Avray, je découvrais quelques pages de ton écriture inouïe de régularité, de clarté calligraphique. En travaillant ensemble, sur mes suggestions, sur tes réactions, quatre pages pouvaient se réduire à une (dans Laissez-passer, le bombardement de Boulogne a  perdu 8 pages en cinq minutes) ou au contraire à partir d’un échange, de nouvelles couleurs apparaissaient, un nouveau personnage entrait en scène.  En quelques minutes, tu absorbais mes critiques (celles qui te semblaient justes), gommais, réécrivais à coté, toujours aussi clairement. On se stimulait l’un l’autre. On voulait s’épater (encore Aurenche : « Ce que j’ai écrit de mieux, c’est quand je voulais épater Bost ou Tavernier. »). On ne savait plus qui écrivait quoi. Ou plutôt, moi je sais que je te dois des milliers de fusées éclairantes, de petites merveilles comme le bouleversant « Il ne faisait pas son poids de taille » de Madame Erlane parlant de son fils Jean (imagine-t-on le bonheur d’une actrice, d’un metteur en scène qui découvre une phrase comme cela, si juste, si révélatrice d’un caractère, d’un milieu et qui est suivie de 20 répliques toutes aussi magnifiques), la tirade sur le malheur qui ne vient pas d’un seul coup, de Cécile Vassort dans Conan ou le bouleversant dialogue sur la manière de faire le thé entre Sabine Azéma et Pascale Vignal, à la fin de La Vie. Des mots tout simples, à l’écart de toute intrigue, et un rapport incroyablement dense entre ces deux femmes écorchées par la guerre.

C’était d’ailleurs notre seul sujet de discussion, la place de l’intrigue. Moi, je voulais tout le temps la décaler et pour toi, elle était au centre. Je me battais pour qu’elle ne domine pas les scènes, qu’on ne termine jamais avec une réplique définitive que je soldais par tous les moyens. J’ai transformé un moment qui aurait pu être explicatif en une vraie scène d’amour entre Irène et Dellaplane, murmurée par les deux acteurs. Ce différend finissait par nous amuser et dans La Princesse, c’est toi qui me proposais les approches les plus obliques (le dépit amoureux se camouflant derrière une discussion sur la poésie et le nom d’un oiseau).

Et dans une scène de Laissez-Passer, tu parles finalement de toi à travers Bost, en donnant cette magnifique définition de ton métier : « Nous sommes des fabricants d’histoires comme il y a des fabricants de pain, des fabricants de drap. » Et quand Aurenche demande : « A quoi est ce qu’on sert ? », tu fais dire à Bost : « À éclairer la vie des fabricants de pain et des fabricants de drap. » Éclairer la vie, tout un programme qui fut le tien.

Et puis Jean, comment oublier la joie, de l’émotion ressentie en découvrant comment tu avais transformé mon projet de lettre à la fin de La Vie (fin qui prenait le contrepied du scénario) en cette prodigieuse, lyrique, déchirante déclaration d’amour, filmée près de la ferme de Noiret.

Lyrisme qu’on retrouve dans cette autre lettre, celle du Comte de Chabannes à Marie de Montpensier.

Car Jean tu étais un écrivain lyrique, épique, qui pensait large, qui absorbait et pouvait brasser des sentiments immenses et douloureux. Tu pouvais aussi faire preuve d’une ironie cinglante (le père de Philippe de Montpensier, confit dans un égoïsme auto-satisfait). Tu affrontais la dureté, la violence, l’horreur du mal parce que tu avais des trésors de générosité en toi. Et d’attention aux autres.

Et la drôlerie cocasse des dialogues de La Fille de D’Artagnan. C’est toi qui avais fait du personnage que joue Claude Rich cet imbécile béat et très dangereux, obsédé par la conquête du monopole du Café. Et le « Pleine Lune, grande lessive » peut rivaliser dans sa cocasserie délicieuse avec le « J’ai glissé sur un macaron » de Noiret dans Le Bossu, la meilleure adaptation du roman de Paul Féval. Et on trouve de nombreux bonheurs de cette qualité dans tes collaborations avec Jean Becker, notamment Dialogue avec mon jardinier que j’aurais aimé revoir pour écrire ce texte. Et dans les Maupassant que tu écrivis pour Laurent Heynemann, notamment L'Héritage avec un Eddy Mitchell somptueux, et Un Gentilhomme, d'après Octave Mirbeau, avec Daniel Russo.

Oui, ce furent des années exaltantes qu’on a passées ensemble. Nous avons tous les deux, en marchant avec Conan, héros noir et complexe, tueur qui peut aussi aller sur le champ de bataille voir ce qui a pu provoquer la peur chez un jeune soldat, côtoyé des abimes (comme l’écrivait Vercel dans des notes inédites). Nous avons célébré le courage quotidien, la décence ordinaire des personnages de Laissez-passer, Aurenche, Devaivre et sa femme, Le Chanois, des héros « qui faisaient ce qu’ils pouvaient quand les autres ne le faisaient pas », affronté les horreurs des Guerres de Religion et là encore, l’héroïsme d’une jeune femme qui veut comprendre et sent que la culture, la connaissance est une arme. Il n’y avait aucun dialogue utilisable chez Madame de La Fayette et ce que tu as fait était extraordinaire d’intelligence et de sensibilité, cette langue absolument pas moderne qui évitait toute reconstitution de pacotille. Et qui se mettait tout de suite en bouche.

Nous partagions tous les deux le même amour des acteurs. Tu les connaissais admirablement après l’expérience du TEP, de la radio et d’ailleurs tu faisais ou supervisais la distribution des films que tu écrivais pour la télé. Comme le faisait Jacques Prévert. Entre l’écriture de deux scènes, on parlait distribution. Et c’était formidable. Tu les aimais les comédiens et tu écrivais admirablement pour eux. Mélanie Thierry m’avait dit qu’une fois qu’elle avait assimilé le sens des mots, tout devenait facile, tout coulait de source dans La Princesse. C’était tellement bien écrit que les tournures les plus ardues, paraissaient, sur le plateau, totalement évidentes. C’est que les mots étaient justes, accordés aux sentiments. Michel Winock, après une projection de Conan, déclara que «  c’était la dialogue le plus juste, le plus fort sur les rapports de classe en 14-18 depuis La Grande Illusion ». Pas mal ce compliment.

Beaucoup d'acteurs ont trouvé avec toi certains de leurs meilleurs rôles : souvenons-nous d'ailleurs de Sylvain Joubert et de Claude Brosset dans Ardéchois, de Victor Garrivier dans La Dictée, de Jacques Morel dans Les Fontane, de Pierre Trabaud, ton vieux complice, merveilleux dans tant de films. Mais aussi Fabrice Luchini et Fanny Ardant dans Le Colonel Chabert, cette adaptation rigoureuse, dépouillée de Balzac. De Marie Gillain, la meilleure Aurore de Nevers dans Le Bossu.

Nous avons été émus ensemble. Mais aussi, Dieu, que nous nous sommes amusés.

J’avais très vite découvert, dès notre premier travail, qu’en fait des liens nous unissaient bien avant notre rencontre : la radio avec Les Maîtres du Mystère de Pierre Billard que j’écoutais religieusement, l’aventure du TEP (j’avais adoré Vie et mort du Roi Jean, Sainte Jeanne des Abattoirs et autres mises en scène de Rétoré que tu avais connu au patronage, je crois) et aussi la chanson, les goualantes que tu écrivais pour Montand et les Frères Jacques. Tu avais choisi la télévision après avoir connu des déboires au cinéma. Moins avec Bonjour Toubib, pourtant très marqué par Noël Noël qu’à cause de divers aigrefins se baptisant producteurs comme celui qui t’avait envoyé un vague projet de contrat sur du papier à en-tête de la prison de Fresnes.

Tu avais mis tous tes espoirs dans la télévision, dans le Service Public. Tu  en avais une conception élevée, reprenant sans le savoir ces propos de Guitry : « Quand vous méprisez le public, vous n’avez pas aussi l’impression de mépriser la France. » Tu prenais ta tâche à cœur comme le Commandant Dellaplane la sienne et tu t’es mis sur la touche quand les valeurs auxquelles tu croyais ont été piétinées par les directeurs de chaîne.

Je m’en veux de ne pas m’être assez battu pour qu’on reprenne ce sujet autobiographique autour de la reconstruction d’un quartier (mais tu avais du mal à parler de toi et je n’ai pas trouvé le bon masque) ou Ardéchois. Mais tu laisses un beau scénario sur de Gaulle pendant la bataille de France.

Et surtout tu nous laisses, tu nous lègues ton exigence, ton absence de cynisme, ton amour de la vie, ta curiosité.

C’est à nous de savoir nous en servir.

Lire la biographie de Jean Cosmos

Les obsèques de Jean Cosmos auront lieu le 2 septembre à 11h à l’Eglise Saint-Roch à Paris.